La loi Carle a été votée le 28 septembre. Elle contient une disposition qui va obliger les communes à financer les écoles publiques ET privées accueillant des enfants venant d'autres communes. C'est une aggravation de la loi Debré qui limitait l'obligation des communes aux écoles situées sur leur territoire. Seul comptera le choix de la famille ; les Maires n'auront aucun avis à formuler, ils n'auront qu'à payer.
La loi Debré respectait, d'une certaine manière, l'idée de service public de l'éducation. Avec la loi Carle, on propose une relation commerciale entre l'usager et l'établissement scolaire. La nouvelle loi fait primer la logique marchande sur la logique de service public, l'intérêt particulier sur l'intérêt général.
La loi Carle représente une étape vers un libre marché scolaire avec l'attribution d'une sorte de chèque-éducation, ce chèque-éducation cher au Front National.
La loi Carle inscrit dans le droit positif, pour la première fois, une obligation de financement liée à la « liberté d'enseignement », ce qui semble peut compatible avec la Constitution. Autre aspect particulièrement contestable : la « parité » entre enseignement public et privé. Mais voilà : les recours déposés devant le Conseil Constitutionnel n'ont pas abouti.
Elle va favoriser la scolarisation dans les écoles privées ; elle va permettre de financer une concurrence inutile et néfaste entre enseignement public et enseignement privé.
Comme le disent Muriel FITOUSSI et Eddy KHALDI (Main basse sur l’école publique, Demopolis, 2008) : " Nanterre paiera pour Neuilly" ! La banlieue paiera pour la ville, les communes rurales seront pénalisées avec un risque fort d’exode scolaire.
La loi Carle va faire augmenter les dépenses d’éducation des communes. Sauf dans les communes où on renoncera à investir dans une construction scolaire, parce que rien ne garantit que la fréquentation sera au rendez-vous !
Sauf lorsque les communes et collectivités locales refuseront de financer les dépenses facultatives des établissements privés.
lundi 26 octobre 2009
jeudi 22 octobre 2009
Le lycée entre démocratie et élitisme
En présentant la création des lycées en 1802 comme un acte signifiant « la fin des privilèges de naissance » le Président de la République ne signale qu'une partie de la réalité historique. Rappelons le contexte et quelques autres éléments non moins significatifs.
La loi du 11 floréal an X clôt le débat ouvert en 1789 pour trouver le meilleur moyen d'assurer l'instruction des futurs citoyens et l'éducation de la Nation, selon le vocabulaire de l'époque. Bonaparte règle ce débat en laissant de côté l'éducation de tous et en décrétant que le rôle de la Nation est de former les cadres de la Nation, et bientôt de l'Empire.
L'idée ne sera pas fondamentalement mise en cause par la Restauration, ni par les régimes suivants, puisque l'enseignement primaire qui se constitue sous la Monarchie de juillet va se développer (et avec quel succès après Jules Ferry) complètement à part de l'enseignement secondaire. Il faut attendre le Front populaire pour que les timides rapprochements réalisés sur le terrain évoluent vers « l'école unique » réclamée depuis plusieurs années. Mais les traces concrètes de la triple filière (enseignement primaire, enseignement secondaire, enseignement technique) subsistent jusqu'aux débuts de la V° République et peuvent expliquer la résistance de l'institution à devenir un lycée pour tous !
Si le Lycée d'aujourd'hui peut s'enorgueillir d'intentions démocratiques qui l'ont fait naitre, il lui reste aussi des traces des objectifs élitaires du lycée de Napoléon. Dire que le Lycée en est prisonnier serait lui faire un mauvais procès, mais lui donner uniquement les qualités -démocratisation- de ces mêmes intentions est également illusoire.
En fait, le lycée d'aujourd'hui est tiraillé entre plusieurs tentations : espace de diffusion au plus grand nombre de la culture classique, marchepied pour accéder aux grandes écoles, lieu de diffusion d'un enseignement « secondaire » (mais cette notion n'est guère comprise que par les professionnels de l'éducation), lieu de bachotage (c'est-à-dire d'entrainement systématique au passage du baccalauréat), voie de garage pour achever son adolescence, ... Ces ambivalences sont sources d'incompréhensions permanentes chez les lycéens.
Plus préoccupant : le lycée étant le passage nécessaire à l'obtention du diplôme-phare, le bac, il devient le modèle et/ou l'objectif de tous les niveaux d'enseignement : collège, école élémentaire, voire école maternelle et enseignement supérieur, ce qui est une manière de nier la spécificité de chacun de ces moments de la scolarité, et qui en perturbe la compréhension dans le public. Les réformes peuvent apporter des solutions techniques pour sortir de cette situation,surtout s'il s'agit de réformes de fond et non de retouches marginales. Mais seul un vrai débat public, permettra de trouver un accord sur la fonction du Lycée dans la République.
La loi du 11 floréal an X clôt le débat ouvert en 1789 pour trouver le meilleur moyen d'assurer l'instruction des futurs citoyens et l'éducation de la Nation, selon le vocabulaire de l'époque. Bonaparte règle ce débat en laissant de côté l'éducation de tous et en décrétant que le rôle de la Nation est de former les cadres de la Nation, et bientôt de l'Empire.
L'idée ne sera pas fondamentalement mise en cause par la Restauration, ni par les régimes suivants, puisque l'enseignement primaire qui se constitue sous la Monarchie de juillet va se développer (et avec quel succès après Jules Ferry) complètement à part de l'enseignement secondaire. Il faut attendre le Front populaire pour que les timides rapprochements réalisés sur le terrain évoluent vers « l'école unique » réclamée depuis plusieurs années. Mais les traces concrètes de la triple filière (enseignement primaire, enseignement secondaire, enseignement technique) subsistent jusqu'aux débuts de la V° République et peuvent expliquer la résistance de l'institution à devenir un lycée pour tous !
Si le Lycée d'aujourd'hui peut s'enorgueillir d'intentions démocratiques qui l'ont fait naitre, il lui reste aussi des traces des objectifs élitaires du lycée de Napoléon. Dire que le Lycée en est prisonnier serait lui faire un mauvais procès, mais lui donner uniquement les qualités -démocratisation- de ces mêmes intentions est également illusoire.
En fait, le lycée d'aujourd'hui est tiraillé entre plusieurs tentations : espace de diffusion au plus grand nombre de la culture classique, marchepied pour accéder aux grandes écoles, lieu de diffusion d'un enseignement « secondaire » (mais cette notion n'est guère comprise que par les professionnels de l'éducation), lieu de bachotage (c'est-à-dire d'entrainement systématique au passage du baccalauréat), voie de garage pour achever son adolescence, ... Ces ambivalences sont sources d'incompréhensions permanentes chez les lycéens.
Plus préoccupant : le lycée étant le passage nécessaire à l'obtention du diplôme-phare, le bac, il devient le modèle et/ou l'objectif de tous les niveaux d'enseignement : collège, école élémentaire, voire école maternelle et enseignement supérieur, ce qui est une manière de nier la spécificité de chacun de ces moments de la scolarité, et qui en perturbe la compréhension dans le public. Les réformes peuvent apporter des solutions techniques pour sortir de cette situation,surtout s'il s'agit de réformes de fond et non de retouches marginales. Mais seul un vrai débat public, permettra de trouver un accord sur la fonction du Lycée dans la République.
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