dimanche 15 novembre 2009

L'apprentissage pour sortir de l'obligation scolaire ?

Alors que la moindre réforme du lycée déclenche contestations, débats et polémiques, la réforme des formations professionnelles s'est tenue dans une totale indifférence médiatique et politique. Le projet de loi a été adoptée par le Parlement le 13 octobre dans la discrétion.

On y relève la proposition faite aux d’élèves de quinze ans de poursuivre leur scolarité dans un Centre de Formation d'Apprentis afin d’y préparer un projet d’apprentissage.

« Art. L. 337-3-1. – Les centres de formation d'apprentis peuvent accueillir, pour une durée maximale d'un an, les élèves ayant atteint l'âge de quinze ans pour leur permettre de suivre, sous statut scolaire, une formation en alternance destinée à leur faire découvrir un environnement professionnel correspondant à un projet d'entrée en apprentissage. »
Art 13 bis BB.

Pourquoi 15 ans, alors que la scolarité est obligatoire jusqu'à 16 ans ? Pourquoi cette insistance à vouloir faire sortir de la scolarisation les jeunes ?


À croire que les Sénateurs qui ont ajouté cet article n'ont pas pris acte des objectifs spécifiques du Collège, dernier moment de la scolarité commune : acquérir un « socle commun de connaissances et de compétences ». Cette vocation du Collège offre une belle perspective, celle de sortir d'en finir avec les filières de relégation (classes de transition, CPPN, quatrièmes et troisièmes techno) qui ont empêché le fonctionnement d'un collège authentiquement unique.


Alors, il faut rappeler les observations internationales, qui convergent vers le même constat : les systèmes éducatifs à filières, ceux qui séparent les jeunes avant la fin de la scolarité obligatoire, sont non seulement les plus inégalitaires, mais aussi les moins efficaces, et ceux qui produisent le plus d'échecs.


Ce que certains traduisent brutalement : « Si vous séparez les bons et les mauvais, vous ne faites pas tellement augmenter le niveau des bons, vous faites beaucoup baisser celui des mauvais, et donc la société y perd au bout du compte. » (
François Dubet, interview dans le Nouvel Observateur, 27/8/2009)

L'apprentissage est une modalité intéressante de formation quand on est avec un bon maître d'apprentissage ... Alors, pourquoi en faire une porte dérobée pour les élèves qui ne savent plus pourquoi ils sont au collège, pour les parents qui ont perdu toute confiance en l'École, pour les enseignants qui ne savent plus comment retenir l'attention de leurs élèves.


Il serait bien plus responsable, politiquement parlant, de mobiliser tous les acteurs sur la nécessité de mener à terme la scolarité de chacun, et de rechercher les moyens de mener à bon port la scolarité de toute notre jeunesse, bref de s'assurer que le principe d'égalité est bien à l'œuvre dans notre système éducatif !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Il est choquant qu’une décision de cette importance soit prise dans un silence médiatique absolu. Cet article soulève opportunément le voile sur une mesure qui concerne l’avenir de beaucoup de jeunes. Il appelle quelques remarques :
1 – Les dix ans de scolarité obligatoire, de 6 à 16 ans, sont une mesure qui ne saurait être remise en cause et à laquelle nous sommes tous attachés.
2 – On ne peut se voiler la face sur le fait que près de 20 % de chaque « promotion » de jeunes quittent l’école sans formation ni diplôme. Parmi eux une proportion inconnue mais évidemment trop importante de jeunes de moins de 16 ans.
3 - La question qui se pose est de savoir quoi faire vis-à-vis de ces jeunes, mineurs, dont les familles sont encore responsables, et qui n’observent pas l’obligation scolaire, sachant qu’ils appartiennent pour la plupart à des milieux pauvres, défavorisés, parfois illettrés ?
Je ne vois que trois voies possibles :
- La première est de sanctionner les familles ou d’exercer sur elles une pression suffisante. Solution évidemment injuste (pour les familles dépassées par le problème) ou irréaliste (lorsque la famille est inexistante ou inconsciente..).
- La seconde est de réorganiser l’enseignement pour que les difficultés soient prises en charge très tôt et pour qu’aucun élève n’ait pas envie de quitter l’école. Le socle de connaissance va certes dans le bon sens, mais on en voit déjà les insuffisances. Le problème est plus profond. Combien d’années ou de dizaines d’années faudra-t-il pour réformer en profondeur notre système éducatif ? On ne peut attendre.
- La troisième est de mettre au point une offre adaptée aux élèves qui préfèrent la rue à l’école afin de les retenir coute que coute dans un environnement scolaire.
L’orientation vers un CFA, pour la plupart de ces adolescents , n’est surement pas une très bonne solution, car ces jeunes n’ont pas les moyens culturels, intellectuels de prendre place dans un rapport de dépendance économique et sociale chez un employeur, dans un environnement professionnel.
Mais quelle est la bonne solution ? La seule façon de s’opposer à ce qui a été voté est de proposer une solution meilleure, plus conforme à nos idéaux. Le silence général s’explique sans doute par notre incapacité à imaginer autre chose.